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Fonds documentaire dynamique sur la
gouvernance des ressources naturelles de la planète

Les grands enjeux de l’évolution du foncier agricole et forestier dans le monde. Des réponses globales sont nécessaires

Documents sources

Merlet, Michel. Les grands enjeux de l’évolution du foncier agricole et forestier dans le monde. Des réponses globales sont nécessaires. Revue Études Foncières. # 143. Janvier 2010.

Résumé

Paradoxalement, aucun type de droit sur les terres agricoles ou forestières n’est considéré aujourd’hui comme appartenant à l’ensemble de l’humanité, alors que leur gestion ne peut se faire dans l’intérêt de tous qu’à un niveau global. Si les marchés fonciers ne peuvent pas s’autoréguler et si la somme des décisions indépendantes des Etats souverains ne tend pas nécessairement vers une gestion durable des ressources naturelles, il faut construire des mécanismes de gouvernance différents, qui impliquent de rendre le droit international plus contraignant.

Un premier article sur les phénomènes d’appropriation à grande échelle des terres agricoles dans les pays du Sud et de l’Est dans le # 142 d’Etudes Foncières a permis d’analyser la nature des processus en cours et d’expliquer pourquoi il fallait distinguer les investissements productifs de mécanismes fondés sur la spéculation foncière ou la capture de richesses naturelles. Il concluait sur des questions. Que conviendrait-il de faire pour éviter d’avoir à souffrir les conséquences irréversibles de ces évolutions?

Ce second article, publié dans le numéro 143 de la revue Etudes Foncières (janvier-février 2010) a pour objectif de faire le point sur les grands enjeux en matière d’occupation des sols et de commencer à explorer quelques propositions susceptibles de permettre un meilleur contrôle de ces phénomènes.

Les usages du sol engagent le devenir de tous. Leurs répercussions écologiques et sociales, positives comme négatives, concernent la société dans son ensemble. C’est pour cela qu’une part de commun doit être reconnue parmi les droits sur le sol, au côté de droits privatifs. Cela devrait se traduire par la mise en place de règles communes au niveau mondial. Pour cela, il convient de poser le débat sur un plan qui aille au-delà des seules logiques d’entreprise et de maximisation des profits.

Centrer toutes les propositions sur le renforcement de la souveraineté des Etats ne peut suffire. Les rapports de force entre ceux-ci et entre les Etats et les multinationales sont beaucoup trop déséquilibrés.

Propositions

Il convient de combiner:

  • des mesures volontaires à différentes échelles, nationales, et mondiales destinées à construire une conscience collective des enjeux et à préparer les parties à l’élaboration de solutions.

  • des mesures administratives obligatoires au niveau des financements et appuis publics de certains Etats aux investisseurs.

  • un travail audacieux et novateur pour aller vers des mesures contraignantes au niveau international, portant à la fois sur

    • la mise en place d’un droit impératif mondial .

      • rendre justiciables les pactes internationaux relatifs aux droits des peuples sur leurs ressources naturelles et au droit à l’alimentation.

      • insérer l’investissement étranger dans le cadre d’un droit qui soit au dessus des contrats, et permette de faire prévaloir la nécessité publique universelle sur les intérêts des investisseurs ou des Etats.

    • et sur la lutte contre les captures de capital naturel et de rentes qui relèvent plus de la piraterie que du capitalisme, par exemple avec :

      • la mise en place de réglementations destinées à éviter l’apparition de rentes liées aux politiques publiques de certains Etats.

      • le recours à la fiscalité foncière.

Ces propositions ne sont encore pour le moment que de simples pistes de travail. Elles n’épuisent pas le sujet et de nombreux problèmes persistent. Leur transformation en une dynamique de changements successifs, en la construction d’une nouvelle gouvernance mondiale demandera beaucoup de travail, et ne se fera pas sans une importante mobilisation des sociétés civiles.

Les politiques publiques nationales et les modalités de gouvernance mondiale doivent pouvoir créer des conditions telles que les grands investisseurs privés et publics contribuent directement au renforcement des capacités de production de systèmes diversifiés d’agriculture et d’élevage à taille humaine. Les Etats hôtes et les investisseurs doivent renoncer à promouvoir l’acquisition massive de droits fonciers, liée au développement d’activités spéculatives dont les conséquences sont irréversibles et néfastes sur le long terme, et qui s’articulent le plus souvent avec la mise en place de systèmes de production à très grande échelle et à salariés.

Cet article, tout comme l’article précédent, n’engage que l’auteur, mais nous tenons à préciser que les idées qui y sont développées ont largement bénéficié de la réflexion que l’équipe d’AGTER a animé au sein du Comité Technique Foncier, à la demande de l’Agence Française de Développement.

Nous remercions ici tous les membres du Comité qui y ont participé, ainsi que la revue Etudes Foncières qui nous a autorisé à les diffuser sur le site d’AGTER et sur le portail foncier et développement.

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