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L’accaparement des ressources naturelles au CAMEROUN. Rencontre débat avec Samuel Nguiffo (CED) à partir du cas d’Herakles

Réunion thématique AGTER du 17 septembre 2012

Samuel Nguiffo est le secrétaire général du Centre pour l’Environnement et le Développement du Cameroun (CED).

Extraits vidéo de la rencontre avec Samuel Nguiffo

Le CED, qui travaille activement sur les conflits relatifs aux terres et aux ressources naturelles au Cameroun, a mené, avec le Réseau de lutte contre la faim au Cameroun (RELUFA), une étude sur un projet de plantation de palmiers à huile de plus de 73 000 hectares au beau milieu de réserves de biodiversité forestière dans le sud du Cameroun. Ils en ont examiné les conditions de lancement et évalué les répercussions écologiques et sociales. Les conclusions de cette enquête ont été présentées fin 2011 dans Le treizième travail d’Hérackles ? Étude sur la concession foncière de SGSOC dans le Sud-Ouest du Cameroun, (document téléchargeable en bas de cette page). Plus récemment, elles ont aussi fait l’objet d’un film, Les Palmiers de la Colère, réalisé par le cinéaste camerounais Franck Bieleu et produit par le CED et le Relufa. C’est avec la projection de ce dernier, en avant-première en France, que la rencontre avec Samuel Nguiffo a été introduite.

Le 17 septembre 2009, l’entreprise SG Sustainable Oils Cameroon (SGSOC), filiale camerounaise de la firme américaine Herakles Farm, a signé un contrat avec le gouvernement camerounais pour la mise en place d’une grande plantation de palmier à huile. 73.086 hectares de terres ont été attribués à l’entreprise américaine, pour une durée de 99 ans. Les contre-parties exigées sont ridicules : de 0,5 à 1 dollar américain maximum par hectare et par an en fonction du niveau les rendements de production réalisés…

En revanche, selon le CED les méfaits de cet accord pour les quelques 25 000 personnes qui vivent sur et de ces terres (et des forêts qui les recouvrent en grande partie) seront considérables. La décision récente de la SCSOC de se retirer de la Table Ronde sur l’Huile de Palme Responsable (RSPO), qui l’engageait à produire selon certains standards sociaux et environnementaux, confirme si cela était nécessaire qu’il y a de grandes raisons de s’inquiéter. Elle montre que l’entreprise n’entend même pas se conformer aux « bonnes pratiques » définies par ce dispositif déjà bien peu exigeant…

Un extrait du rapport d’étude Le treizième travail d’Hérackles ?:

«Le 8 août 2011, une ONG camerounaise, Struggle to Economise Future Environment (SEFE), a déposé auprès du tribunal de Mundemba un recours visant à obtenir qu’un moratoire soit imposé à la plantation de la SGSOC. L’ONG y présentait la possibilité de dommages ou de préjudices irréversibles pour les communautés locales en cas de poursuite du projet. La cour a statué en faveur de la SEFE le 31 août 2011, en décidant d’un arrêt du projet, avec une astreinte de 500.000 FCFA par jour en cas de violation. Plus tard, le même tribunal a ordonné l’arrestation d’un des représentants de la SGSOC pour non-respect du moratoire du 31 août.

Selon SEFE, le juge s’est par la suite vu retirer le dossier, pour des raisons non précisées.

La SGSOC et Héraklès ont publiquement déclaré que leur projet a « le soutien sans faille des communautés ». Cette déclaration n’illustre pas les vrais sentiments des groupes locaux. Dans le village de Fabe, des jeunes sont descendus dans les rues pour bloquer les bulldozers de la SGSOC en signe de protestation. Selon l’ONG Pro Wildlife, des communautés de Fabe, Massaka Bima, Mbile et Mundemba, ont toutes envoyé des lettres de plainte au gouvernement pour s’opposer à ce projet.

Une bonne partie de la population locale a le sentiment qu’il existe déjà trop de restrictions sur l’utilisation des terres en raison de la présence d’aires protégées dans la région. L’ajout d’une plantation de palmiers de 60.000 ha accentuera ces restrictions, et renforcera le sentiment d’injustice qui anime parfois les communautés privées de l’utilisation de la terre de leurs ancêtres. Les populations rurales d’ordinaire dociles opposent donc une résistance farouche à ce projet. »

Le documentaire projeté aux participants montre notamment que le projet d’Herackles Farm au Cameroun ne suscite pas seulement des oppositions dans les villages directement concernés mais aussi parmi les élus nationaux…

Pourquoi les pouvoirs publics camerounais privilégient-ils la location d’immenses étendues de terres à cette multinationale aux dépens des communautés qui les utilisent ? Pourquoi lui offre-t-il des conditions aussi favorables ? Une autre orientation de l’utilisation des ressources communes que sont la terre, l’eau et les forêts est-elle souhaitable au Cameroun ?

L’étude de cas préparée par le CED et le RELUFA sur le giga-projet de plantation de palmier à huile Herakles Farm est téléchargeable sur cette page.

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